Vinod Saighal 
                          En 2010, la Chine a pris le monde par surprise en déclarant  qu’elle considérait le Sud de la mer de Chine comme un enjeu d’intérêt national  au même titre que Taiwan et le Tibet. Le durcissement de son attitude, prise au  sérieux par les pays de la région, provoqua un retour de bâton. Sentant qu’il avait prématurément  dévoilé son jeu, le gouvernement chinois se hâta de changer de cap pour  rassurer le monde sur le caractère pacifique de sa monté en puissance. 
                              L’Inde  est-elle un acteur extra régional? 
                            A mesure que la Chine fait montre d’une plus grande capacité  militaire et d’une plus grande assurance, un certain nombre de pays se tournent  vers les Etats-Unis pour assurer le maintien de leur indépendance, de leur sécurité  et de leur stabilité. Dernièrement, ces alliés ont commencé à se demander si  les USA pouvait garder leur liberté de manœuvre dans la région, et si son  économie, si dépendante de la Chine et menacée de récession, pouvait soutenir  son haut niveau de dépenses militaires et sa capacité de projection. Leurs doutes quant aux  capacités américaines ont fait tourner leurs regards vers l’Inde comme possible  contrepoids régional. 
                            L’anxiété à l’égard de la Chine inclut  l’Australie qui souhaite maintenant que l’Inde prenne la tête dans la formation  d’une communauté Asie-pacifique, qui se construirait sur les mêmes bases que  l’Union européenne. Durant sa visite officielle en Inde de 2009, le Premier  ministre australien Kevin Rudd exprima que l’Inde était une pièce centrale de  cette communauté et que les deux pays se devaient d’être des partenaires  naturels, dans une région où les rivalités de grande puissances doivent être  « harmonisées et réconciliées. » La signature en novembre 2009 d’une  déclaration commune sur la sécurité et la coopération fut un pas positif dans  cette direction. 
                            Des ouvertures similaires ont été  faites de temps à autres par le Japon, la Corée du Sud et la plupart des pays  de l’ASEAN. Ce n’est qu’en 1992 que l’Inde a lancé, tardivement et avec  réticence, sa politique d’ouverture à l’Est. L’Inde est maintenant la troisième  économie de l’Asie après la Chine et le Japon. Quoiqu’en pense la Chine, aucun  des pays de l’ASEAN ou de l’Asie du Sud-est ne considère l’Inde comme une  présence négligeable. Car elle est un facteur de multipolarité, non seulement  en mer du Chine méridionale mais dans toute l’Asie, sinon dans le monde. Il est  impossible de la traiter comme un pouvoir extra-régional, étranger à l’Asie,  tels les Etats-Unis, pour la simple raison que pendant des millénaires, la  culture indienne s’est répandue vers l’Est, jusqu’en Chine, au Japon et en  Corée. De fait, les écrivains chinois des premiers siècles décrivaient le pays  d’au-delà les Himalaya comme « le Ciel de l’Ouest ». Des millénaires  de paix, de bonne volonté et d’harmonie liés à l’influence indienne ont  développé chez ses voisins d’Asie orientale un sentiment positif à l’égard de  sa présence. Aujourd’hui encore, l’Inde représente pour eux un facteur de  stabilité.  
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